Credit: Campagne
Civile Palestinienne contre le Mur de l'Apartheid
Date: 6 janvier 2006.
Le terminal vaste et imposant
que les forces d'occupation israéliennes
ont construit à Qalandiya sert de checkpoint-clé
dans le contrôle des mouvements des palestiniens.
Il a été inauguré en décembre
2005, provoquant souffrance, frustration et par
dessus tout humiliation pour les milliers de palestiniens
qui passent tous les jours pour le travail, les
études, les services de base ou pour rendre
visite à la famille. Voici les récits
de quelques palestinien-ne-s forcé-e-s
d'utiliser ce terminal, racontant leurs expériences
et expliquant comment l'intensification de l'occupation
rend la vie insupportable.
Deema Abu Hyala, Sabreen
Abu Hyala, Dalal al Halawani et Siham al Halwani,
étudiants à l'école secondaire
de al Ahed à al-Ram, tous ont 12-13 ans.
"Maintenant nous venons
au terminal à 6 heures du matin et parfois
même 5h30. Il y a toujours beaucoup de monde
le matin. Ils nous font attendre une heure avant
de pourvoir passer les premières portes-tourniquets.
Ces portes sont bloquées et on ne peut
passer que quand la lumière est verte.
Au début du processus de contrôle,
nous devons passer par des portes à rayon-X.
Nous devons mettre nos sacs sur la table pour
qu'ils soient contrôlés par la machine
à rayons-X. Ça ressemble à
la frontière avec la Jordanie. D'abord
on donne le certificat de naissance. Ensuite ils
nous crient de venir au contrôle suivant.
Nous sommes trop jeunes et nous n'avons pas de
cartes d'identité, donc nous ne pouvons
pas passer sans le certificat de naissance. Une
fois, Sabreen l'a oublié, et ils l'ont
renvoyée. Ils sont des menteurs. Chaque
fois ils annoncent que les nouvelles structures
mises en place rendront les voyages plus faciles,
mais ils rendent la vie encore plus compliquée."
Une des filles continue: "J'ai
toujours peur quand je passe la procédure
de contrôle. Je suis effrayée si
quelque chose sur moi déclenche la sonnerie,
surtout depuis que j'ai vu un garçon forcé
d'enlever ses pantalons. Quand il passait la porte
à rayons-X, elle a sonné à
plusieurs reprises, alors les soldats lui ont
demandé d'oter sa veste et son pantalon.
A la fin, c'était quelque chose sur ses
pantalons qui faisait sonner les senseurs. C'est
très humiliant. Je ne peux pas me déshabiller
devant les gens et les soldats."
Muhammed Maher,
20 ans, étudiant à la al-Quds Open
University de Ramallah.
"Chaque jour je passe par
Qalandiya et chaque jour j'attends au moins 2
heures mon tour. Souvent ils ne choisissent pas
la file dans laquelle je me suis mis. Il y a cinq
files au total et vous avez de la chance si vous
faites la queue dans la bonne."
"C'est comme si vous voyagez
vers un autre pays ou comme dans un port. C'est
vraiment une expérience horrible. La procédure
de contrôle dure environ 15-20 minutes.
D'abord je mets ma carte d'identité dans
un petit trou, ensuite ils me hurlent d'aller
à l'étape du contrôle corporel.
Je dois enlever ma veste, ma ceinture et les objets
métalliques et mon sac et les mettre de
côté. Je dois passer de l'autre côté
à travers la porte à rayons-X. C'est
le même genre de machines utilisées
sur le pont qui va en Jordanie. Si vous l'avez
déjà vu. Une fois la machine a sonné
alors que je passais. C'était horrible
de devoir repasser. Je me suis demandé
que vaut la vie si je dois endurer cela tous les
jours."
"Quelques fois j'essaie
de passer par Surda (un checkpoint au nord de
Ramallah, atteignable après une heure et
demi de route depuis Qalandiya et bientôt
interdit d'accès). Pourtant, ça
me coûte trois à quatre fois plus
d'argent que de passer par Qalandiya et ça
me prend aussi beaucoup de temps."
"Les
forces d'occupation ont mis une rose à
la sortie du terminal. C'est quelque chose de
bizarre, je ne sais pas ce qu'elle est censée
symboliser. Vous ne savez pas que faire quand
vous la voyez. J'adorerais la déchirer.
Ils vous mettent dans cette souffrance et cette
situation humiliante et ensuite ils vous confrontent
avec ça. Ce n'est pas notre espoir - c'est
tout ce qui abîme nos espoirs."
Amani Syam,
22 ans.
"Je suis étudiant
à l'Université d'Abu Dis. Je passe
Qalandiya tous les jours et c'est vraiment terrible
pour moi. C'est une attente interminable avant
d'arriver au cours. Je dois attendre 2 heures
mon tour. De nombreuses fois j'ai raté
les cours, spécialement les premiers jours
après l'inauguration du terminal. Le passage
n'était pas autorisé aux Palestiniens
avec carte d'identité de Cisjordanie. Ensuite,
j'ai réalisé combien je dois attendre
chaque jour. Maintenant je viens 2 heures avant
mes cours. Le processus de contrôle c'est
de la folie. Vous vous sentez comme un criminel
ou un animal. Faire la file est très humiliant,
mais en plus, traumatique. Le plus dérangeant
c'est que vous savez que tout ça est fait
uniquement pour vous faire perdre du temps et
pour vous traiter mal. Ce n'est pas pour la sécurité
ou rien de tel. Ils veulent imposer des "frontières"
de cette manière. C'est une affaire politique,
en plus ils ont mis cette rose pour nous rendre
encore plus fâchés et frustrés.
Ils jouent avec nos sentiments. Je ne sais pas
comment je vais continuer cette façon de
vivre. La situation empire de jour en jour."
Ahmed Ayyesh
27 ans, de Biddu
"Je travaille à Ramallah.
J'ai été forcé de passer
par ce nouveau système de chekpoint tous
les jours. Depuis le début de la deuxième
intifada, j'arrivais souvent très tard
au travail, alors j'ai décidé d'habiter
à Ramallah afin de ne pas perdre mon travail.
Chaque trois jours je retournais à la maison
pour voir ma famille et laver mes vêtements."
"Un jour la résistance
palestinienne a tué un des soldats au checkpoint
de Qalandiya. Ils l'ont complètement fermé
et je n'ai pas vu ma famille pendant 3 semaines.
Hier j'ai décidé de leur rendre
visite. Quand j'ai atteint le nouveau checkpoint
fortifié à Qalandiya, j'étais
choqué. On dirait que vous vous rendez
dans un autre pays, c'est comme le Pont (vers
la Jordanie). Des tas de gens attendent, des soldats
crient dans les haut-parleurs. Ça crée
une horrible atmosphère. Ils ont fermé
toutes les files et environ six cent personnes
attendaient que la lumière passe au vert.
A la fin, une seule des cabines fonctionnait alors
que les autres étaient fermées.
J'ai attendu plus d'une heure mon tour, en vain.
Vous entendez de nombreux soldats utilisant les
haut-parleurs et parlant tous en même temps.
Vous ne comprenez pas ce qu'ils disent. En plus,
vous ne les voyez pas. C'est très bruyant
et écoeurant. Soudain les soldats se sont
énervés et ils ont commencé
à nous crier de quitter la file et d'aller
dans la salle d'attente. J'ai attendu encore 40
minutes et ensuite je suis revenu à Ramallah."
"Ce qui est une provocation
encore plus révoltante c'est la rose qu'ils
ont mise à la sortie du checkpoint fortifié.
Ils vous traitent comme
des animaux et ensuite ils vous montrent des roses!"
Source: Campagne
Civile Palestinienne contre le Mur de l'Apartheid