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Pleurer pour Gaza
par Anne-Catherine Menétrey
28 décembre 2008

Cela se préparait depuis plusieurs jours ; depuis ce matin, c’est fait. L’armée israélienne a attaqué Gaza. Il y a des centaines de morts et de blessés, les images de cette nouvelle guerre sont insoutenables. Ce n’est pourtant que le début, proclame le gouvernement israélien ! Rapportés par les journaux, les propos des généraux font froid dans le dos : on parle de « liquider » les chefs du Hamas et de « casser » le mouvement de résistance du Hamas. « Notre objectif n’est pas de réoccuper le territoire pour l’éternité, seulement de s’en emparer pour le nettoyer »1 « liquidations », « nettoyage ethnique », ces termes rappellent d’extrêmement mauvais souvenirs. Cependant, s’agissant de Gaza et des Palestiniens, ils me sont hélas pas nouveau.

Voilà quarante ans que la Palestine est occupée, que le territoire est morcelé, qu’un forme d’apartheid se développe, que les Palestiniens sont dépossédés de leurs terres, menacés par les attaques de l’armée ou des colons, en butte aux violences et aux discriminations. Pour ce qui concerne Gaza, ça fait plus d’une année que ce territoire surpeuplé est soumis par Israël à un blocus quasi hermétique. Rappelez-vous : tout au début de 2007, une brèche dans le mur séparant Gaza de l’Egypte avait permis à des milliers d’habitants de se précipiter de l’autre côté de la frontière, non pas pour fuir ou pour acheter des armes, mais pour se procurer du pain et du lait, ou tout simplement pour souffler. Depuis des mois et des mois, Gaza étouffe, Gaza suffoque, Gaza ne peut plus ni bouger, ni travailler, ni se soigner, ni manger. Dans cette prison à ciel ouvert, l’enfermement a des conséquences dramatiques. « Gaza, c’est comme une ferme de 1,6 millions d’animaux à qui l’on jette de la nourriture », déclarait il y a quelques mois le défenseur des droits de l’homme à Gaza Raji Souravi. « L’occupation et le siège israéliens, les bombardements et les destructions quotidiennes ont fait des habitants des mendiants. Ce n’est pourtant pas nous. Ce n’est pas notre mentalité »2.

Et voilà qu’aujourd’hui cette population déjà réduite au désespoir doit subir en plus les assauts enragés de l’armée israélienne, les destructions massives, et les bombardements aveugles, qui font mourir indistinctement combattants du Hamas, civils, femmes et enfants. Pour quoi faire ? Pour la paix et la sécurité d’Israël ? Certes, des roquettes sont tirées par le Hamas sur le sud du pays. Est-ce que cela justifie une punition collective de cette ampleur, en violation des conventions de Genève ? Est-ce concevable de penser que ce déluge de feu apportera l’apaisement ou la soumission dans le cœur des Palestiniens ? C’est exactement le contraire qui va se passer, tant l’exaspération est grande à Gaza.

Quand la Lybie de Khadafi hurle que c’est « œil pour œil, dent pour dent », tout le monde crie au scandale. Mais quand l’armée d’un pays prétendument démocratique pratique la loi du talion, les protestations se font rares et le silence est assourdissant. Il faut arrêter avec cette fiction d’une guerre ordinaire qui mettrait aux prises deux armées. La disproportion des forces devient criminelle. Ce n’est plus une punition, c’est un massacre !

Voilà pourquoi, je pleure pour gaza, sans savoir vers qui me tourner pour trouver un peu d’espoir et de réconfort.

 

Anne-Catherine Menétrey

 

Notes:
1 Selon les propos de l’ex-général Doron Almog, cité par Le Temps du 27.12.08
2 Cité pa Le Temps, janvier 2007
 
 


 

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