Al-Mas'arah est un petit village en Cisjordanie
au sud de Bethlehem dans lequel les missions
civiles du CUP se sont rendues à
plusieurs reprises pour aider à la cueillette
des olives. Nous avons aussi participé
aux manifestations pacifiques du vendredi dont
Qahar Aladeen faisait aussi certainement partie.
Les autorités israéliennes ont
encore récemment confisqué 170
hectares de terre palestinienne pour agrandir
la colonie d'Efrat et les militaires ne cessent
de harceler la population aussi bien le jour
que la nuit. La répression devient de
plus en plus violente alors que la population
ne baisse pas les bras et persévère
avec un courage admirable sa lutte avec des
moyens pacifiques. A la lecture du rapport de
l'accident, l'ignominie des militaires et des
ambulanciers israéliens ayant refusé
de transporter Qahar le palestinien alors qu'ils
transportaient la journaliste française
vers un hôpital israélien nous
met le cœur en larme. Qahar en est mort.
Que la honte poursuive à jamais ceux
qui l'ont laissé mourir sur le bord de
la route.
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Le 14 septembre, Qahar Aladeen est décédé
dans la soirée à la suite d’un
accident de voiture. Jeune homme de 29 ans,
instituteur dans l’école du village
d’Al Ma’sra, militant actif, père
de deux très jeunes enfants, Qahar était
un homme généreux, souriant, aidant,
très humain. De nombreuses personnes
venant de l’étranger ont pu le
rencontrer lors des manifestations hebdomadaires.
Sa jeune femme Tasneem a fait partie d’un
groupe de femmes palestiniennes qui ont été
reçu dans le Vercors par l’Association
Trièves-Palestine. Quelques semaines
avant son accident Qahar avait accueilli chez
lui plusieurs internationaux pendant une quinzaine
de jours.
Le soir de l’accident, Qahar voulait
rendre service à une journaliste française,
venue faire un documentaire sur le sport en
Palestine. Il est parti en voiture pour l’amener
dans un village proche, connu pour son équipe
de football. Sur la route sa voiture est tombée
en panne. Il a téléphoné
à un taxi pour les amener au match. C’est
à un carrefour que l’accident a
eu lieu.
Les soldats israéliens sont arrivés
immédiatement sur place. Il faut dire
qu’ils surveillent cette route, entre
autre, à cause de la proximité
d’un grand colonie, construit illégalement
en terre palestinienne. Les soldats ont tout
de suite établi un périmètre
autour de la voiture, empêchant des Palestiniens
de s’approcher. Par contre les soldats
n’ont pas arrête la circulation
sur la route, ce qu’ils font chaque fois
s’il s’agit d’un accident
concernant des israéliens. Ils ont téléphoné
pour qu’une ambulance israélienne
vienne. En effet chaque colonie possède
sa propre ambulance, et une ambulance a pu se
rendre rapidement sur place. Il y avait deux
blessés graves, la Française et
Qahar. Le chauffeur a été tué
dans le choc de la collision. L’ambulance
israélienne a tout de suite amené
la Française à Jérusalem,
au grand centre hospitalier d’Haddassah.
Utilisant les routes des colons ils ont pu faire
le trajet dans une vingtaine de minutes. Mais
Ils ont laissé l’autre blessé,
Qahar, sur place. Ils ne lui ont accordé
aucun soin. Ce sont donc les Palestiniens témoins
de l’accident qui ont dû téléphoner
à l’hôpital de Bethlehem
pour faire venir une ambulance. Dans les villages
palestiniens autour, il n’y a pas de médecin.
L’ambulance circulant sur les routes palestiniennes
a mis 30 minutes pour arriver sur place. Encore
30 minutes pour ramener Qahar à l’hôpital,
le temps de l’examiner, il est mort sur
la table de l’opération, probablement
d’hémorragies internes.
La jeune Française a survécu.
Deux êtres humains, deux traitements différents.
Il n’y avait rien qu’empêchait
l’ambulancier de soigner les deux blessés.
Ils auraient pu amener les deux blessés
à Haddassah. Cela a été
fait dans le passé. L’ambulancier
et les soldats ont choisi de ne pas le faire.
On pleure la mort de Qahar. On se promet de
continuer sa lutte pour le village et pour le
Palestine. Reste malgré tout un sentiment
amer qui subsiste. Les circonstances entourant
l’accident choque nos sensibilités
d’internationaux. Nos amis palestiniens,
eux savent que cela fait partie de leur quotidien.
Ils le vivent tous les jours.
Mary